Vendredi 23 septembre 2011

A Mirebeau, dans l'heureuse perspective de voir arriver ce soir, en ce prieuré, M-J. S., Ch.T-S, et E.; je profite de la belle journée pour apprêter le jardin, aidé de l'aimable jardinier venu de Lencloître. Pour la première fois, ce jeune homme, qui se veut militant de la non-violence, provoque une conversation sur le sujet "Marine le Pen", qui manifestement le tracasse : comment un homme comme moi, me dit-il le rose aux joues, peut-il rejoindre une telle horde de nationalistes, gens violents comme on sait, incultes, etc. ?

Pour une fois, je ne me dérobe pas (je ne prise guère les conversations politiques front à front, qui en général ne servent qu'à porter les positions à l'extrême, en somme à rien), et explique les choses telles que je les vois -principalement que nous sommes intégralement des politiques, donc des remparts contre la violence, laquelle viendra justement du grand désordre jeté dans le monde par le règne forcené des oligarchies mondiales… Il m'écoute et conclut que, si il a jusqu'à présent évité de voter (sauf de temps en temps pour la gauche -je crois bien, les écologistes), il est bien décidé, cette fois, à ne pas prendre part aux prochains scrutins, ajoutant qu'il ne croit, lui, qu'aux solutions individuelles. Certes, je crois en elles aussi, et que bien des germes d'une civilisation nouvelle apparaissent ici ou là, du côté des "marginaux anti-système" parmi lesquels il se range-il m'expliqua un jour que sa famille et lui vivaient de peu, consommant le moins possible. Mais je doute que de tels courages dispersés, pour annonciateurs qu'ils soient, suffisent à "créer un autre monde" -c'est sous-estimer fort la puissance des géants, me semble-t-il; moins encore à écarter drames et violences et peut-être même les guerres… Le ressaisissement des peuples par eux-mêmes, la restauration de l'action raisonnée de l'Etat et de l'indépendance nationale contre les déchaînements supra-nationaux, c'est à dire la politique, quels meilleurs moyens pour prévenir la violence et les guerres -qu'elles soient à haute ou basse intensité ? (Je garde le mot "guerre" que j'ai utilisé voici vingt quatre ans dans le titre d'un de mes livres, "l'Europe vers la Guerre", et que reprend d'ailleurs ces jours-ci un certain Dessertine, auteur d'un "Le monde s'en va-t-en guerre" dont on fait grand cas, ces jours-ci, sur les ondes, et auquel donnait écho l'autre jour le ministre polonais des finances, Jan Vincent Rostowsky, faisant des gammes sur le risque de guerre qu'encourrait l'Europe si elle échouait -comprendre : si l'UE échouait; or, elle échouera. Pour en revenir au charmant jardinier, je doute de l'avoir convaincu du noble rôle de la politique, laquelle lui paraît mauvaise en son essence même. On verra bien. Et lui aussi, d'ailleurs.